Au lieu de se rejeter les fautes, il incombe à chacun d'entre nous d'éviter de contribuer au surtourisme
Les voyages devenant de plus en plus accessibles, on passe vite d’une opportunité à une menace, qui rime avec l’angoisse du surtourisme. Y’a-t-il des solutions pour éviter d’y contribuer, échapper aux problèmes qui impactent les populations et l’environnement, ces effets secondaires néfastes qui éclipsent souvent les retombées et avantages issus de l’activité touristique.
Rappelons que le tourisme s’avère bénéfique dès qu‘il contribue à développer des économies, créer des emplois, encourager et financer la préservation des cultures et des sites historiques. Le point critique de ces aspects positifs est atteint dès que trop de touristes se concentrent au même moment au même endroit : le tourisme de masse devient alors surtourisme, et les impacts négatifs se multiplient. Les villes, musées et sites les plus populaires sont visités à un rythme si effréné que la surpopulation crée des problèmes aux populations locales.
Dans les villes, la hausse des prix des loyers et la pénurie de locations longue durée à Barcelone sont dus à l’afflux de locations Airbnb. L’exode vers les faubourgs de Marrakech résulte de la « riadhisation » de toutes les maisons typiques du centre-ville. New-York interdit la mise en location d’appartements pour une durée inférieure à 30 jours. Le Machu Picchu et le Taj Mahal limitent la durée de présence sur le site, et la plupart des musées imposent des créneaux horaires.
Le danger d’acculturation a poussé Gion, le quartier des geishas de Kyoto à interdire aux visiteurs l'accès à ses ruelles privées, les geishas japonaises de plus en plus mal à l'aise d'être la cible des touristes sans leur consentement. Toute destination trop fréquentée perd en authenticité créant ainsi une fracture culturelle qui déçoit les voyageurs à la recherche de dépaysement et perd tout son charme.
Les environnements naturels ne sont pas en reste. Par exemple, Boracay aux Philippines s’est fermée aux visiteurs pendant 6 mois en 2018, pour se remettre des dégâts causés par le tourisme de masse.
Qui est responsable? Les touristes sont bien sûr les coupables désignés, mais qui a influencé leur choix de destinations de voyage ? les offices de tourisme, les campagnes de pub de voyagistes, les médias sociaux, les influenceurs du voyage ? On blâme tour à tour les compagnies low-cost dont les prix d’appel ont occasionné l’explosion du surtourisme en Europe du Sud et de l’Est, puis les croisiéristes qui se déversent en nombre pour des escales courtes sans contribuer de manière significative à l'économie locale, créant au passage des désagréments pour les résidents.
Comment restructurer le tourisme pour mieux contrôler ses flux et impacts ?
A court terme, la coopération des touristes, des professionnels, des destinations et des médias semble indispensable. Faut-il restreindre les accès en réduisant le nombre de vols ou l’accostage des navires de croisière pour contrôler directement les flux de touristes dans une région ou une ville ? N’est-il pas plus logique de les monnayer en ajoutant des taxes touristiques aux factures d'hôtel et/ou aux frais de visa ou taxes d’aéroport, sous réserve que cette manne alimente la protection des ressources naturelles, l'entretien des installations touristiques ou la conservation des sites.
A long terme, le marketing et l'éducation devraient favoriser l’éclosion de nombreux sites et régions sous-estimées, hors des sentiers battus vers des régions moins fréquentées. Introduire une notion de slow tourisme inverse le rapport quantité/qualité et permet en augmentant la durée de séjour dans chaque étape, d’interagir correctement avec les communautés, explorer davantage un lieu, et contribuer financièrement au tourisme des entreprises locales. S’il semble impossible à certains de renoncer aux destinations et sites touristiques populaires, il reste possible d’éviter les mois de haute saison et alléger le fardeau du surtourisme, en étant chaleureusement accueilli le reste de l’année. De plus voyager hors saison permet de bénéficier enfin de prix corrects sur les vols , les hôtels et les circuits.
Prendre un chemin moins fréquenté peut parfois s’avérer frustrant par l’idée de passer à côté des incontournables, mais créer sa propre aventure est une façon de voyager bien plus enrichissante et mémorable, à l’écart des foules, files d'attente et prix gonflés, et sans se sentir prisonnier de l’orthodoxie des hashtags.
Et chacun pourra alors fièrement se vanter que ses photos ne sont plus les pales copies des cartes postales ou des images ressassées sur les réseaux sociaux !
C’est toujours la faute des autres !